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Total : le successeur de Patrick Pouyanné sera-t-il l'homme du gaz et des énergies renouvelables ?

14/12/2020
Source : La Lettre A
Catégories: Sociétés

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Stéphane Michel, héritier présumé de Patrick Pouyanné, PDG de Total, doit faire son entrée au Comex du groupe en mars 2021. Activement soutenue par le corps des Mines, cette ascension préparée depuis plusieurs années coïncide avec la volonté de transition écologique du pétrolier.

Cela ne fait guère de doute : le mandat de PDG de Patrick Pouyanné, 57 ans, qui s'achève en 2021, sera renouvelé l'an prochain jusqu'en 2024. Mais, traditionnellement, Total prépare de longue date la succession de son capitaine dans le cadre d'un recrutement interne.

Bourreau de travail, Stéphane Michel, X-Mines de 47 ans, actuel directeur Moyen-Orient Afrique du Nord de la division "Exploration & Production" dirigée par Arnaud Breuillac, est identifié depuis plusieurs années comme le dauphin désigné par le puissant corps des Mines. Avant de rejoindre Total en 2005, il avait débuté sa carrière en 2000 à l'Agence France Trésor, puis avait été, de 2002 à 2004, conseiller technique de Francis Mer au ministère de l'économie et des finances.

Ambition de long terme

Sa nomination prévue en mars 2021 comme directeur général de la branche "Gas, Renewables & Power" - l'une des cinq du groupe -, en remplacement de Philippe Sauquet, et son entrée simultanée au Comex, font de Stéphane Michel un bon candidat à la succession de Patrick Pouyanné en 2024, voire en... 2027.

Cette ambition clairement affichée ne facilite pas ses relations avec le PDG, au fonctionnement très vertical et naturellement autoritaire. Son avenir dépendra bien sûr de sa capacité à s'imposer dans ses prochaines fonctions. Mais auparavant, il devra réussir à faire figurer Total en bonne place, dans les prochaines semaines, dans un dossier particulièrement stratégique pour le groupe : le méga-appel d'offres lancé par le Qatar pour accroître la production annuelle de l'énorme champ gazier North Field, et la faire passer de 77 millions de tonnes de gaz naturel liquéfié (GNL) à 110 millions de tonnes.

L'enjeu qatari

Arrivé pour la première fois en 2008 au Qatar comme directeur Joint Venture and Business Development puis devenu directeur général de Total dans le pays en 2011, Stéphane Michel a continué à y développer ses relations en tant que directeur Moyen-Orient Afrique du Nord de 2014 à aujourd'hui. Il est notamment très proche de Saad Sherida al-Kaabi, ministre d'Etat de l'énergie et en même temps PDG de Qatar Petroleum, l'entreprise publique qui gère toutes les activités pétrolières et gazières de l'émirat.

Soucieux de garder le plus large contrôle possible sur sa production de gaz (l'émirat est le premier exportateur mondial de gaz naturel liquéfié), le gouvernement qatari impose des conditions très sévères aux opérateurs pétroliers. L'appel d'offres pour le North Field Expansion Project (NFEP) voit ainsi une compétition acharnée entre les six groupes qui ont fait l'objet d'une première sélection. Ce sont, outre Total, les américains ExxonMobil, Chevron et Conoco-Phillips, l'anglo-néerlandais Royal Dutch Shell, et l'italien ENI.

Reporté à plusieurs reprises, le résultat de l'appel d'offres devrait intervenir fin janvier 2021. Stéphane Michel espère bien que Total fera partie des trois groupes finalement sélectionnés pour participer à l'expansion du North Field. Ce serait pour lui l'aboutissement de plusieurs années d'efforts avant de quitter la division "Exploration & Production", afin de prendre la tête de la branche "Gas, Renewables & Power". Créée en septembre 2016, cette dernière entité répond à l'objectif de transition énergétique qui a été accéléré depuis le début de l'année sous la forte impulsion de Patrick Pouyanné.

La révélation américaine

On raconte chez Total que le PDG a déclenché une vraie prise de conscience, après un séjour aux Etats-Unis, auquel il avait convié le Comex à une conférence sur les Greentechs et à une visite au Consumer Electronics Show (CES) de Las Vegas. Il aurait alors acquis la conviction que l'ère du pétrole allait inexorablement décliner et que la réduction de l'intensité carbone du mix énergétique du groupe devenait une priorité absolue. Il a, depuis, lancé moult études pour conforter cette orientation.

Cependant, alors que les écologistes et les experts du changement climatique considèrent que la production de gaz est aussi nuisible pour le climat que celle du pétrole, Patrick Pouyanné a fait du gaz l'un des grands axes de développement de l'entreprise, estimant qu'il s'agit d'une "énergie à plus faible contenu carbone" que l'or noir. Il est vrai que la rentabilité du gaz s'exprime à deux chiffres quand celle de l'éolien et du solaire est encore très faible (moins de 4 %).

Le gaz, cette énergie fossile d'avenir

Total mise aussi sur une forte demande asiatique : la Chine arrête progressivement ses centrales électriques à charbon pour les remplacer par des équipements alimentés au gaz. En Inde, où le gouvernement a engagé un important virage pour réduire ses émissions de CO2 liées au charbon, le groupe s'est aussi renforcé en nouant un accord en octobre 2019 avec le distributeur local du pays, Adani, sur la fourniture de GNL.

Le gaz a aussi l'avantage d'être facilement extractible, là où les ressources pétrolières inexploitées se trouvent aujourd'hui dans des zones difficiles d'accès comme en mer profonde. Ces gisements, Patrick Pouyanné dit depuis plusieurs années ne pas vouloir y toucher en raison des coûts à supporter. Le PDG préfère se concentrer sur les actifs à point mort bas. Ce plafond, en dessous duquel le pétrolier perd de l'argent, est ainsi estimé chez Total à 25 $ le baril.

Pas plus de pétrole d'ici à 2030

Cette stratégie a franchi un nouveau cap devant les investisseurs fin septembre. Patrick Pouyanné l'a annoncé : la production de pétrole de la major va stagner voire décliner d'ici à 2030, alors qu'il expliquait encore l'inverse en début d'année. Dans ses résultats de 2019, la production continuait pourtant à augmenter : Total a sorti 3,014 millions de barils équivalent pétrole (bep) par jour, contre 2,566 millions en 2017, soit une hausse de 17,5 %.

Ces chiffres ont toutefois été bouleversés par la crise du Covid-19 et la chute des prix - le baril de brent est passé en dessous des 20 $ en avril, même si le cours est aujourd'hui remonté au-dessus des 50 $. Pour la branche exploration-production du groupe, le résultat net a chuté de 76 % sur les neuf premiers mois de 2020, comparé à la même période sur l'année précédente, alors qu'elle n'a enregistré qu'une baisse de 4 % sur sa branche "Gas, Renewables & Power".

Verdir le mix

De fait, les ambitions de Total sur la production de l'électricité, générée par des centrales à gaz et de plus en plus via le solaire et l'éolien, se sont aussi accélérées. L'entreprise était pourtant jusqu'à récemment très peu présente, avec 5 % de ses ventes dédiées à cette énergie en 2019. Avec un objectif de production de 40 % de renouvelable en 2050, Total a multiplié les acquisitions à prix d'or pour pénétrer un marché qui s'est considérablement concentré en quelques années.

Il a ainsi pris le contrôle en 2016 du fabricant de batteries Saft ainsi que du producteur belge d'électricité et de gaz Lampiris. En 2018, cela a été le tour du troisième électricien français, Direct Energie, et en 2020 du spécialistes des énergies renouvelables Global Wind Power France.

Un autre enjeu du pôle "Gas, Renewables & Power", dont Stéphane Michel deviendra le pilote, sera de donner à ses activités une couleur plus verte. Pour ce faire, Total mise notamment sur le développement de projets de captage et de stockage du CO2, dont les résultats sont encore balbutiants.

Stocker et compenser

Sur le plus emblématique, Northern Lights (en Norvège), le groupe, opérant aux côtés de Shell et d'Equinor, a annoncé en mai 2020 un projet pour transporter et stocker jusqu'à 1,5 million de tonnes de CO2 par an dans les roches sous-marines de la mer du Nord. L'opération vise à décarboner à l'échelle industrielle, la seule possible pour ces technologies.

Pour le reste, Total entend compenser avec l'investissement dans des puits naturels de carbone - comprendre les forêts et écosystèmes - ou par le rachat de crédits carbone. Le groupe, qui s'est engagé à atteindre la neutralité carbone en 2050 à la fois sur sa production et l'usage qu'en font ses clients (en Europe), a confié ces projets à la direction Carbon Neutrality Businesses (LLA du 02/12/20).

 


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