Profitez d'une expérience simplifiée
Retrouvez toute l'information économique et financière sur notre application Orishas Direct à Télécharger sur
Play Store
La Première Dame de Côte d’Ivoire a eu le mardi 17 septembre 2019, une rencontre avec les sénateurs américains Ron Wyden et Sherrod Brown. Ces représentants du Congrès américain sont les auteurs de la lettre envoyée au département de la sécurité intérieure des États-Unis d’Amérique pour l’inviter à mettre un embargo sur le cacao ivoirien.
Ci dessous son discours devant les sénateurs américains
Messieurs les sénateurs,
Tout d’abord, merci de nous recevoir, car je sais que votre agenda est chargé.
Je voudrais vous présenter la délégation qui m’accompagne à savoir :
Monsieur le Ministre Patrick ACHI, Secrétaire Général de la Présidence ;
Monsieur Mamadou HAIDARA, Ambassadeur de Côte d’Ivoire aux Etats Unis ;
Madame Patricia Sylvie YAO, Directrice de Cabinet de la Première Dame, Secrétaire exécutive du CNS ;
Madame Tessy WINKELMAN, Consultante auprès du CNS chargée de la lutte contre le travail des enfants;
Et Monsieur Tod PRESTONE, Senior Vice President of GPG.
Nous avons lu avec beaucoup d’intérêt le courrier que vous avez adressé au Ministère de la Sécurité concernant le travail des enfants dans la cacaoculture et nous sommes venus aujourd’hui échanger avec vous sur cette question.
Messieurs les Sénateurs,
Le travail des enfants est une préoccupation qui nous touche particulièrement. Etant moi-même très engagée dans la protection et le bien-être des enfants depuis plus de vingt ans avec ma Fondation, Children Of Africa qui s’occupe des enfants en matière de santé, d’éducation et de social.
C’est la raison pour laquelle, mon époux le Président Alassane OUATTARA dès son accession à la Présidence en 2011, a reconnu le phénomène et m’a confié la charge de la lutte contre le travail des enfants dans notre Pays.
Le Président de la République a tout de suite pris la question du travail des enfants à bras le corps, en créant deux comités :
Le Comité Interministériel qui regroupe 13 Ministères et qui est présidé par le Ministre du Travail ainsi que le Comité National de Surveillance que je préside et qui regroupe : le BIT ; l’UNICEF; des coopératives et des industriels de cacao ainsi que des ONG nationales et internationales qui travaillent dans le domaine de la protection de l’enfant.
Dès le début, j’ai d’abord voulu comprendre le phénomène.
Qui sont ces enfants qui travaillent ?
Ou sont-ils ?
D’où viennent-ils ?
Vont-ils à l’école ?
J’ai voulu connaitre l’ampleur du phénomène, chiffres à l’appui.
Il est ressorti des études de l’USDOL que 85% des enfants qui travaillent dans la cacaoculture, vont à l’école, vivent avec leurs parents et les accompagnent dans les plantations en dehors des heures de cours. Les 15% restant ne vont pas à l’école et sont des enfants à risque.
Messieurs les Sénateurs,
Concernant le travail forcé, toutes les études comme celles de Vérité et de Walk Free Foundation estiment à 0,17% le nombre d’enfants victimes de travail forcé dans la cacaoculture. Soit un chiffre très bas, mais néanmoins intolérable car, rien ne justifie que l’on fasse travailler des enfants.
Messieurs les sénateurs ;
C’est pourquoi, depuis 2012, nous avons mis en œuvre des Plans d’Action Nationaux.
Les deux premiers ont été entièrement exécutés.
Le troisième plan d’action 2019-2021, vient d’être adopté avec un budget de 127 millions de dollars Américains, pour s’attaquer, dans une approche holistique aux causes profondes de ce phénomène.
Je voudrais énumérer à présent les principales actions que nous avons effectuées à partir de ces plans.
– Pour prévenir le phénomène, nous avons réalisé de vastes campagnes de communication à travers tout le Pays car, le plus important a été de changer les mentalités et faire comprendre aux paysans que le travail des enfants est complétement interdit.
– Nous avons expliqué que les enfants qui accompagnent leurs parents au champ après l’école ne doivent pas exécuter les travaux dangereux comme l’utilisation des machettes ou des pesticides.
– Nous avons également organisé des séminaires et formé plus de 70 000 acteurs de la chaîne de remédiation : les préfets, les magistrats ; les travailleurs sociaux ; les journalistes ; les policiers ; les gendarmes ; et enfin et surtout les coopératives de producteurs de cacao.
En 2011, nous avons constaté qu’il y avait très peu d’école à proximité des plantations. Pour remédier à cette insuffisance, l’Etat de Côte d’Ivoire et ses partenaires ont beaucoup investi dans la construction d’écoles et de cantines scolaires qui permettent aux parents de laisser leurs enfants toute la journée à l’école car ils y reçoivent des repas équilibrés.
Ainsi, 30 000 salles de classe en milieu rural dans les zones cacaoyère ont pu être construites.
Toutes ces actions ont permis au Gouvernement de rendre l’école obligatoire en Côte d’Ivoire en 2016, pour tous les enfants âgés de 6 à 16. Ce qui n’existait pas auparavant
Grâce à cette mesure, le taux de scolarisation des enfants vivants dans les zones de production du cacao est passé de 59 % en 2008 à 90 % en 2019.
La pauvreté est reconnue comme la cause essentielle du travail des enfants et je me bats personnellement pour lutter contre la pauvreté des femmes grâce à un micro crédit que j’ai initié avec l’aide du Président de la République et qui a permis à plus de 200 000 femmes de devenir autonomes et d’améliorer les conditions de vie de leurs familles.
Comme vous le savez, la Côte d’Ivoire étant la locomotive économique de l’Afrique de l’Ouest francophone avec 40% du PIB de la sous-région francophone, elle attire de nombreuses populations des Pays voisins.
Pour renforcer la lutte contre le travail des enfants, j’ai organisé en 2017, la conférence des Premières Dames de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel sur la lutte contre la traite transfrontalière et le travail des enfants avec la participation de 14 pays de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel.
Dans le domaine de la protection des enfants, ma Fondation Children Of Africa a construit trois centres d’accueil à l’intérieur du Pays, pour recueillir et prendre en charge les enfants victimes d’exploitation.
Parmi les actions les plus importantes dans le domaine de la répression qui ont été réalisées, la Côte d’Ivoire a adopté des lois et des décrets pour réprimer la traite, l’exploitation et le travail des enfants. Ce qui n’existait pas auparavant. Ces lois interdisent formellement le travail des enfants sous toutes ses formes et prévoient des peines de prison fermes pour les trafiquants et tous leurs intermédiaires. Grâce à ces lois, à ce jour, plus de 220 trafiquants ont été condamnés à des peines d’emprisonnement de 15 à 20 ans.
Messieurs les sénateurs ;
Tous nos efforts ont été reconnus par le Gouvernement Américain, qui, à travers le Département d’Etat, nous a félicités à plusieurs reprises pour toutes ces actions et a classé la Côte d’Ivoire parmi les Pays qui font des efforts significatifs pour éliminer le travail des enfants. Cela, de façon consécutive depuis 2012.
De plus, depuis mai 2019, la Côte d’Ivoire a été reconnue par le BIT comme Pays pionnier dans le cadre de l’objectif 8.7 du développement durable des Nations Unies sur l’élimination du travail des enfants.
C’est pourquoi, votre correspondance adressée au Ministère de la sécurité, suggérant l’embargo du cacao ivoirien nous préoccupe au plus haut point.
Cette mesure, si elle venait à être appliquée, serait une catastrophe pour les milliers de petits producteurs de cacao et leurs familles qui vivent dans des conditions déjà difficiles et qui représentent au moins 6 millions de personnes qui vivent directement de la cacaoculture.
En plus, la Côte d’Ivoire qui est un havre de paix et un oasis économique pour les populations des pays voisins fuyant le terrorisme et la pauvreté dans leurs Pays risque d’être à son tour en proie à ces dangers.
Un embargo, loin de freiner le travail des enfants, ruinerait tous les efforts déjà consentis.
C’est pourquoi messieurs les Sénateurs, nous vous demandons de nous aider à combattre le phénomène et de nous encourager dans cette lutte. Nous espérons compter avec la collaboration des Etats Unis, pour ensemble venir à bout du travail des enfants dans les plantations de Cacao en Côte d’Ivoire.
A cet effet d’ailleurs, je vous informe que nous avons eu ce matin, une réunion très constructive avec madame Brenda SMITH responsable des affaires internationales des douanes américaines et son équipe pour discuter de cette question et préparer leur visite en décembre prochain à Abidjan.
Au cours de cette réunion, nous sommes convenus de mettre en place les bases d’un partenariat entre nos deux structures pour nous aider à éliminer le travail des enfants dans la cacaoculture.
Je vous remercie.
Travail des enfants dans la cacaoculture: Les douanes des USA et de la Côte d’Ivoire vont coopérer
Le séjour de Madame Dominique Ouattara, Première Dame et Présidente du Comité national de lutte contre les pires formes du travail des enfants à Washington n’est pas du tout de tout repos.
Rencontres publiques, B to B, audiences, tout y passe. En fin de matinée de ce mardi 17 septembre 2019, la délégation ivoirienne a eu une importante séance de travail avec les douanes américaines dans une des salles de conférences du Four Seasons. Dans un bref exposé, la Présidente du CNS a expliqué chiffres à l’appui les engagements de la Côte d’Ivoire en matière de lutte contre le travail des enfants. Des chiffres et des faits qui n’ont pas laissé indifférents Madame Brenda Smith, Responsable des affaires internationales des Douanes américaines et sa délégation de huit cadres. Elle s’est dit impressionnée par le travail accompli par le Comité national de surveillance des actions de lutte contre la Traite, l’Exploitation et le Travail des enfants et a félicité Madame Ouattara pour son engagement personnel.
Pour sa part, le Secrétaire général de la Présidence ivoirienne, le ministre Achi Patrick a réitéré la détermination du gouvernement a mené à bien cette lutte et à sécuriser les forêts classées.
Dans une bonne ambiance, la Présidence du CNS et la Responsable des affaires internationales des douanes américaines ont jeté les bases d’une collaboration entre la Côte d’Ivoire et les Douanes américaines.
Premier signe des bonnes intentions des uns et des autres, une délégation des douanes américaines sera en mission d’inspection en décembre prochain à Abidjan. La capitale économique ivoirienne ne sera pas une exception car les douanes américaines entendent envoyer des missions dans tous les pays producteurs de cacao.
Les rencontres avec les personnalités politiques, administratives et la société civile se poursuivront jusqu’à la fin de la mission c’est-à-dire le 20 septembre.