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Retrouvez toute l'information économique et financière sur notre application Orishas Direct à Télécharger sur Play StoreLes monnaies virtuelles se multiplient dans le monde occidental. Les banques centrales ne veulent pas perdre la main face au secteur privé
AWashington, Francfort et du côté de la Silicon Valley, dans les couloirs feutrés des banques centrales comme dans les bureaux des géants du numérique, on regarde l’expérimentation chinoise autour du yuan digital avec un mélange de curiosité et d’inquiétude. Curiosité, car ce test grandeur nature offre un aperçu des possibilités qu’ouvrent les « monnaies digitales de banque centrale » (MDBC), comme les appellent les experts. Inquiétude, « car prendre de l’avance sur cette technologie pourrait permettre à la Chine de dicter les évolutions futures des infrastructures mondiales de paiement, celles facilitant le commerce et les envois de fonds transfrontaliers », résume Aditi Kumar, spécialiste du sujet à l’université d’Harvard.
Aujourd’hui, près de 80 % des banques centrales de la planète étudient la possibilité de créer leur propre monnaie digitale, reposant notamment sur la blockchain (une technologie de stockage et de transmission des informations), selon la Banque des règlements internationaux. Une poignée d’entre elles ont déjà entamé des expérimentations. « Il existe deux types de MDBC, très différentes, précise Patrick Artus, économiste en chef de Natixis. La première est réservée uniquement aux règlements entre banques, tandis que la seconde est destinée aux particuliers – il s’agit, alors, de l’équivalent numérique des billets émis directement par la banque centrale. » Cette seconde forme de monnaie ne passerait pas par les dépôts bancaires, comme les euros ou dollars aujourd’hui utilisés pour les paiements par CB ou virements.
Depuis quelques mois, la Banque de France expérimente le premier type de MDBC. En octobre 2020, la Banque centrale européenne (BCE) a lancé une consultation publique sur l’opportunité de créer une version digitale de la monnaie unique destinée aux citoyens, en complément du cash. « Nous aurons un euro digital », a pronostiqué sa présidente, Christine Lagarde, mercredi 13 janvier, ajoutant que cela prendrait néanmoins du temps. La Banque de Suède, elle, mène des travaux autour d’une « e-krona » depuis 2016. Testée depuis un an, elle pourrait compléter les couronnes traditionnelles et être utilisée pour des paiements par une application mobile. De son côté, la Réserve fédérale (Fed, banque centrale américaine) mène des recherches avec le Massachusetts Institute of Technology.
Un double enjeu
Dans tous les cas, l’enjeu est double : utiliser ces nouvelles technologies pour améliorer la sécurité et l’efficacité des moyens de paiements et, surtout, ne pas être dépassé par les innovations émanant de la Chine ou du secteur privé. A l’exemple du bitcoin, créé en 2008, dont le cours ne cesse de s’envoler. Et surtout du libra, de Facebook : son annonce, en juin 2019, a d’abord fait pâlir d’angoisse les banquiers centraux.
A l’époque, le groupe de Mark Zuckerberg avait présenté le projet Libra comme une ambitieuse monnaie numérique cofondée avec 28 partenaires, dont Uber, Mastercard ou Free (dont le fondateur, Xavier Niel, est actionnaire à titre individuel du Monde). Son objectif : secouer le système bancaire en proposant des moyens de paiement « plus rapides, plus simples et moins chers », notamment pour le 1,7 milliard de personnes sans compte en banque. La cryptomonnaie devait s’appuyer sur un panier de devises, dont l’euro et le dollar. Les entreprises fondatrices pouvaient, elles, créer des porte-monnaie électroniques intégrés à leurs services, à l’image de Facebook et de ses filiales WhatsApp, Instagram et Messenger, réunissant des milliards d’utilisateurs dans le monde.
Le cocktail a vite semblé trop explosif aux régulateurs financiers, qui ont organisé un tir de barrage contre le projet, au nom de la souveraineté des Etats, de la sécurité des transactions et de la lutte contre le blanchiment. Après avoir résisté plusieurs mois, Libra a essuyé la défection de nombreux partenaires de poids, dont le système de paiement Paypal qui a, depuis, annoncé qu’il accepterait les transactions en bitcoins. En avril 2020, le projet lancé par Facebook a réduit ses ambitions : il est désormais question de se concentrer sur de simples versions électroniques de monnaies nationales, en commençant par le dollar.
Retardé plusieurs fois, le lancement de la première monnaie de l’association, rebaptisée au passage « diem », pourrait intervenir dès que l’autorité suisse Finma aura donné son aval. Soit possiblement début 2021, écrivait le Financial Times,
en décembre 2020.
De son côté, Facebook se tient prêt à lancer son porte-monnaie électronique, lui aussi rebaptisé : « novi ». L’application serait « en cours d’obtention d’autorisation »
dans plusieurs pays et régions. La monnaie électronique et le paiement en ligne sont toujours un pilier central de la stratégie de Mark Zuckerberg, qui souhaite ajouter une couche d’« e-commerce » à son écosystème d’applications. Le groupe s’est d’ailleurs battu de longs mois pour obtenir l’autorisation de généraliser à toute l’Inde son test de paiement électronique dans WhatsApp, et tente de faire de même au Brésil. Face aux autorités sceptiques ou inquiètes de ses projets de monnaie numérique privée, Mark Zuckerberg les a plusieurs fois présentés comme une extension du « leadership » financier américain et occidental. Les bloquer, a-t-il argumenté, serait s’exposer à la menace… des Chinois.
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