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Retrouvez toute l'information économique et financière sur notre application Orishas Direct à Télécharger sur Play StoreManque de transparence, incertitudes politiques et contraintes réglementaires redoublées ont conduit au rejet d’une transaction historique dans la finance ouest-africaine. L’analyse de Jeune Afrique.
C’est par une déclaration succincte, le 29 octobre, que le groupe bancaire Oragroup, a « pris acte » de l’avis conforme défavorable de la Commission bancaire de l’Union monétaire ouest-africaine (CBUMOA) quant à son changement d’actionnaire majoritaire. La décision du régulateur met un frein à la reprise, annoncée en novembre 2019, par l’Institut de prévoyance sociale – Caisse générale de retraite des agents de l’État (IPS-CGRAE) des parts d’Oragroup détenues par le fonds d’investissement panafricain Emerging Capital Partners (ECP) et ses partenaires institutionnels (Proparco, DEG, BIO et BOAD).
« Le tour de table d’Oragroup reste inchangé. Il revient aux actionnaires de décider de la suite à donner », commente Ndèye Bineta Delphine Ndiaye, directrice de la communication du groupe, contactée par Jeune Afrique. Fin 2019, Oragroup était détenu à 50,01 % par ECP Financial Holding et à 9 % par l’IPS-CGRAE.
Comme l’a révélé Jeune Afrique Business+, la direction de la caisse de retraite, assurée par Abdourahmane Berté, s’attèle déjà à trouver de nouveaux partenaires afin de convaincre le régulateur et de finaliser la transaction, notamment du côté des autres caisses de retraites de la sous-région.
Un coup d’arrêt « temporaire » ?
Le veto de la CBUMOA met cependant un coup d’arrêt – temporaire, insistent les parties au dossier – à une opération historique dans le secteur financier ouest-africain, à savoir la reprise d’un établissement bancaire par un gestionnaire local de fonds de retraite.
La décision du régulateur signale aussi certaines faiblesses dans la préparation de cette transaction, ainsi qu’une mauvaise appréciation tant du renforcement récent des exigences réglementaires que de l’environnement politique régional, en pleine turbulences, selon plusieurs leaders du secteur interrogés par Jeune Afrique, qui ont requis l’anonymat pour commenter une opération impliquant un acteur financier majeur de la région et une entreprise cotée en Bourse.
* Manque d’informations sur la solidité financière du repreneur
Selon les informations de Jeune Afrique, l’avis défavorable du régulateur intervient après de longs mois d’échanges infructueux entre la Commission bancaire et le duo Oragroup-CGRAE. En juin dernier, la CBUMOA s’impatientait déjà de « l’absence d’informations complémentaires récentes » indispensables à l’analyse de la « solidité financière » du repreneur.
L’inquiétude des banquiers centraux est double. Elle concerne d’une part la transaction annoncée fin novembre, dont les détails n’ont pas été rendus publics et dont les contours (prix, modalités de paiement) restaient incertains aux yeux du régulateur. Ce dernier est également soucieux de la capacité de la caisse de retraite ivoirienne à assurer le développement ainsi que la conformité réglementaire des filiales de Oragroup.
« Outre ses obligations de paiement des pensions, IPS-CGRAE doit, si nécessaire, contribuer à la mobilisation de ressources pour soutenir les filiales bancaires de Oragroup – qui est présent dans douze pays d’Afrique centrale et d’Afrique de l’Ouest, mais aussi pour soutenir Versus Bank, qu’elle détient à plus de 45 % », décrypte un banquier ouest-africain. En outre, Oragroup, quatrième banque de la zone Uemoa en termes de bilan, est inscrite sur la liste des établissements bancaires d’importance systémique régionaux auxquels s’applique une surcharge de fonds propres.
« La question à se poser est la suivante : le nouvel actionnaire majoritaire a-t-il les reins suffisamment solides pour soutenir un acteur systémique en cas de crise. Avec plusieurs établissements et des épargnants dans plusieurs pays, la capacité à renforcer les fonds propres pour ne pas fragiliser l’ensemble du système est désormais primordiale », selon ce banquier.
« La Caisse ivoirienne n’a pas de difficultés à remplir ses obligations en qualité de caisse de retraite. C’est plutôt sa stratégie d’investissement dans le secteur bancaire qui est mise en cause », explique une autre source.
Par ailleurs, la prise de participation dans Oragroup amènerait la Caisse ivoirienne à investir plus de 30 % de son portefeuille de placements dans des actifs financiers risqués (actions) et 15 % chez un même émetteur. Un scénario qui irait à l’encontre de la politique de placements de l’institution et aux injonctions du régulateur de la prévoyance sociale.
* Environnement institutionnel et appuis politiques
En novembre 2019, lors de l’annonce de la transaction avec ECP, la direction de l’IPS-CGRAE avait salué cette opération inédite « financée par des revenus exceptionnels ».
De fait, la disponibilité des ressources nécessaires à l’acquisition d’Oragroup repose en grande partie sur l’apurement par l’État ivoirien, ces dernières années, de divers arriérés et charges dus à la caisse de retraite, selon nos informations.
Un rattrapage permis en grande partie par l’appui de l’ex-Premier ministre ivoirien Amadou Gon Coulibaly, décédé le 8 juillet dernier. « Sans l’appui de ce dernier, le soutien continu d’Abidjan pour cette aventure dans la banque n’était plus garanti. Si vous ajoutez à cela les incertitudes liées à l’élection présidentielle… », décrypte un banquier ivoirien.
Sans rejeter entièrement cette lecture, un de ses collègues sénégalais insiste plutôt sur le fait que « la commission bancaire interprète les textes à la lettre et la BCEAO obtient toujours ce quelle veut ». Autrement dit, les réticences à fournir certaines informations au régulateur ont fini par peser.
Selon cette source, il est important de noter que « ce n’est pas la licence bancaire d’Oragroup qui était en jeu, mais la capacité du repreneur à assurer la conformité future du groupe avec les exigences en termes de KYC (connaissance des clients), de finance, et de gouvernance. Une chose est d’être actionnaire minoritaire d’une banque – comme l’IPS-CGRAE l’est de plusieurs établissements de la région – une autre est de la diriger au jour le jour ».
« Le régulateur a sûrement tenu compte du fait que la caisse de retraite n’était pas une banque. C’est toujours un sujet bloquant, ils aiment bien que les banques soient rachetés par des groupes financiers. Normalement l’actionnaire actuel reste au capital donc il n’y a pas d’impact important, sauf en termes d’image. Certains clients peuvent s’inquiéter et surtout cela peut affecter la valeur de la banque. Le reste a priori est inchangé… », explique un autre familier du secteur bancaire régional.
* Une régulation encore plus renforcée avec Bâle 2 et Bâle 3
Plus indulgent, le patron d’un des cinq premiers groupes bancaires ivoiriens note: « C’est un avis défavorable, certes. Mais c’est aussi la possibilité d’introduire un nouveau dossier avec des éléments de nature à apaiser les craintes du régulateur. Cela a au moins l’avantage de préciser les éléments manquants ». Selon notre interlocuteur, « le deal Oragroup-CGRAE est la première opération de taille réalisée depuis la transposition dans notre régulation des normes de Bâle 2 et Bâle 3. Il était difficile d’anticiper les exigences de la Commission bancaire ».
Décidées dans la foulée de la crise financière de 2007-2008, ces dispositions ont radicalement accru les exigences imposées aux banques, « notamment le besoin de renforcer de façon continue les capitaux des banques ».
« Auparavant, il n’y avait pas le même niveau d’exigence. Aujourd’hui même une banque bénéficiaire a pour priorité de renforcer ses fonds propres. Satisfaire l’actionnaire et distribuer des dividendes sont devenus secondaires. La question du type d’actionnaire majoritaire désormais requis se pose », estime notre source.
Ce dernier regrette « l’effet ciseaux » imposé par les nouvelles réglementations. « On nous demande plus de bancarisation, mais aussi plus d’efforts de contrôle, de gestion des risques, de renforcement des fonds propres… Il est impossible de poursuivre les deux objectifs en même temps ».
Cet état de fait complique davantage l’équation pour IPS-CGRAE et pour ECP. Selon nos informations, la crise économique engendrée par la pandémie du Covid-19 a renforcé les pressions sur les institutions de prévoyance sociale, tenues par ailleurs de maintenir un niveau élevé de « réserves techniques » permettant d’assurer le paiement des prestations sur plusieurs dizaines de mois. Aussi, convaincre les autres caisses régionales de s’associer à la reprise d’Oragroup ne s’annonce pas aisé.
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